« La foi en la nourriture, c’est manger et voir le monde se nourrir de la paix retrouvée de son assiette. Savoir qui l’on est, s’en montrer digne, arrêter de se remplir de ses peurs et réveiller sa vie, c’est activer la force vitale du monde. La cuisine par sa formidable matérialité permet de réaliser ce miracle à chaque repas. »
C’est beau, j’ai lu ces phrases dans « Le goût silencieux – la pratique zen de la nourriture » de Valérie Duvauchelle.
Dans les statistiques des frais de la vie quotidienne, plus on est pauvre, plus on dépense dans la nourriture, et plus on est riche, plus on dépense dans la culture. Je comprends bien le concept, mais je ne suis pas forcément d’accord. Si on choisit la bonne qualité de nourriture, on va bien sûr augmenter nos dépenses. Dans ma vie, la nourriture est un loisir, un plaisir.
J’aime lire sur la nourriture, tout ce qui parle de l’expérience des grands chefs, l’art gastronomique, la qualité de production… tout ! Sauf les recettes. Il y a 2 raisons qui font que je ne regarde pas les recettes :
- Une recette montre la façon de faire de quelqu’un, mais pas la mienne, j’ai ma façon de faire.
- J’ai du mal à appréhender le poids et la quantité, 100gm ou 50ml ne veulent rien dire dans ma tête.
Dans les magasins de presse, on voit toutes sortes de magazines de recettes, colorés de rouge ou rose, dans les rayons femmes. Les recettes ultra rapides et pratiques sont éternellement à la mode. Ces magazines me donnent une imagination de femmes débordées, qui courent entre leur boulot, les enfants, les taches ménagères, et faire la cuisine. C’est curieux, comme s’il n’y avait que des femmes qui faisaient la cuisine. Pourtant les grands chefs sont pour la plupart masculins.
Seules quelques femmes ont marqué l’histoire gastronomique française. En 1933, la mère Brazier de Lyon est devenue la première femme triplement étoilée au guide Michelin. Elle travaillait 18h par jour, obsédée par le sens de l’ordre et de la précision dans sa cuisine. Elle a fait 50 ans d’une belle carrière comme cheffe. A ce niveau de trois étoiles, il y avait aussi Marguerite Bise en 1951 et Anne-Sophie Pic en 2007.
Sans parler de ces professionnels, est-ce-que quand on n’a pas le temps ni les moyens, on perd aussi le choix, le goût, le respect à la nourriture ? Tout devient kitsch comme ces magazines « féminins »… Est-ce que ce respect est seulement accessible pour les gens aisés ?
La street food peut permettre de concilier le respect et l’accessibilité. Seul ou à plusieurs, souvent dans un endroit à proximité très pratique, donc la rapidité nous fait gagner du temps, et pas cher.
Je me souviens des petits sandwichs au hareng fumé d’Amsterdam, les pierogi frits de Varsovie, les currywurst de Berlin, les pavés de saumon du port de Helsinki. Ces goûts divers et riches que j’ai trouvés pendant mes voyages.
Il ne faut pas penser que la street food est facile à faire. Regardez les street food Michelin, ils sont magnifiques. La préparation des ingrédients, la marinade et cuire la viande, ça prend beaucoup de temps. Ça demande de la patience et de la précision. Le charme de la street food, c’est qu’on voit une partie de la cuisine : c’est une manière d’assister au savoir-faire des cuisiniers.
Comme dans toutes sortes de cuisines, c’est délicieux quand c’est fait avec amour. Ils méritent du respect. Chacun a sa foi en la nourriture, selon ses différents moyens.