Quand j’ai revu mes photos de voyage au musée de Suzhou, bizarrement je ne me suis souvenu de rien du tout de ce que j’ai vu dans les expositions du musée. Ce qui m’a marqué c’est le musée même, une œuvre d’art magnifique par l’architecte Ieoh Ming PEI. Son œuvre la plus célèbre, tous les français la connaissent : c’est la pyramide du Louvre.
Le musée de Suzhou est dans un style chinois traditionnel modernisé. Les éléments de la nature sont intègrés dans l’ensemble de la composition, la végétation et l’eau ajoutent des couleurs plus vives à celles du bâtiment : blanc et gris. Il s’est inspiré des maisons traditionnelles locales, aux murs blancs et tuiles grises.
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Le jeu des lumières traversantes, si intelligent, allume les espaces. Il y a une force de tranquillité, comme si on était coupé du monde, dans un espace hors du temps. Dans cet espace aéré, je sens presque l’odeur de la nature. En même temps, quand on regarde dans n’importe quel coin, les détails forment un joli tableau. Chaque recoin est calculé, rien n’a été oublié. Il y a à la fois une impression de grandeur et de délicatesse.
M. Pei est né à Suzhou, et a ensuite émigré aux États-unis où il a fait ses études d’architecte. Il utilise des matériaux comme le verre, le béton, la pierre, dans une esthétique fonctionnelle. Son but est de créer des espaces de déplacements et de rencontres (musée, bibliothèque, hôtel…), en respectant la tradition, tout en restant cohérents et harmonieux.
Ainsi, sa pyramide de verre est intemporelle, mais il y a cette résonance de richesse de l’histoire.
Ses œuvres me font penser à la musique de Tan Dun. Chez lui, les éléments de la musique chinoise se marient avec la technique de la musique occidentale. On connaît bien ses musiques de film, mais il a fait beaucoup d’œuvres d’orchestre et de musique de chambre. Il mélange l’opéra de Pékin, les instruments et le rythme traditionnel, et les éléments religieux dans ses compositions. Il a créé une nouvelle forme de musique, une nouvelle acoustique. Quand j’ai écouté son « Nu shu » à l’auditorium de Lyon, j’avais les larmes aux yeux. C’était comme si on me racontait une histoire familière dans une langue étrangère, et que je la reconnaissais sans difficulté. Ça m’a réchauffé le cœur, j’étais fière de ma culture chinoise.
Dans une création qui mélange des éléments artistiques, il faut qu’ils soient équivalents. C’est-à-dire, la musique traditionnelle de Chine a autant de profondeur que la musique classique. L’esthétique architecturale chinoise a autant de profondeur et d’histoire que l’architecture occidentale. Ce sont différentes cultures qui existent parallèlement depuis des siècles. Leur richesse crée un équilibre.
J’ai un grand respect pour les artistes chinois qui vivent en France, comme Zao Wou-ki, ou encore François Cheng. Leur âme chinoise est profondément enracinée, coule dans notre langue, notre esprit et notre sang, et nourrit leurs créations.